Les 4 règles à respecter pour un échauffement optimal

Chez les athlètes d’endurance déjà très entraînés, le potentiel d’amélioration de la vitesse de la cinétique de VO2 par l’entrainement est susceptible d’être limité. Cependant, il existe une intervention aiguë qui semble avoir le potentiel d’améliorer la performance en modifiant la réponse de la cinétique de VO2 à l’exercice, à savoir l’échauffement.

Tous les athlètes ayant déjà pratiqué un entraînement par intervalles seront familiarisés avec les effets : la deuxième série parait souvent plus facile que la première, malgré le fait que la récupération après la première série soit incomplète. Il semble donc étrange que si peu d’athlètes appliquent ces 4 principes pour optimiser leur échauffement et en conséquence leur performance.

Nous verrons dans cet article, comment construire sa routine d’échauffement optimal pour accélérer sa cinétique de VO2 👇

Comment faire l’échauffement optimal ?

Tout d’abord, pour accélérer sa cinétique de VO2, le terme «échauffement» semble être un terme inapproprié car ni l’élévation passive de la température musculaire à l’aide de bains chauds, ni la réalisation d’un échauffement relativement long mais de faible intensité n’influencent de manière significative la cinétique de VO2 (Burnley, Mark et al., 2002).

Il semblerait plutôt qu’une période d’exercice d’intensité relativement élevée, qui élève la lactatémie à une concentration d’environ 2-5 mmol/L immédiatement avant le départ de votre course ou d’une séance d’intervalles importante, soit nécessaire pour améliorer la cinétique de VO2.

Plusieurs études ont montré que la performance était améliorée si l’échauffement intégrait une période d’exercice d’intensité élevée. Par exemple, Andrew Jones a montré qu’un échauffement intense améliorait la réponse du VO2 et augmentait le temps de soutien jusqu’à 30 à 60 % lors d’un exercice d’intensité quasi maximale (Figure 1., Jones, Andrew M et al., 2003).

Figure 1. Le graphique du bas représente un test jusqu’à épuisement à 100% PMA. Le graphique du milieu, un test à 110% PMA. Le graphique du haut, un test à 120%. Les cercles noirs représentent la réponse du VO2 à une première séance d’exercice de haute intensité effectuée sans aucun exercice d’échauffement précédent, tandis que les cercles blancs représentent la réponse à une séance d’exercice identique effectuée 6 à 10 minutes plus tard. Notez que, dans l’ensemble, la cinétique du VO2 semble être accélérée lors du deuxième exercice. Cette modification favorable de la cinétique du VO2 est associée à une amélioration des performances (temps de maintient plus long). Extrait de Jones, Andrew M et al., 2003.

L’intensité optimale

Les preuves disponibles semblent indiquer qu’un échauffement qui n’élève pas la lactatémie avant le départ, au-dessus de la concentration de repos d’environ 1 mmol/L n’améliorera pas de manière significative la cinétique d’O2 ou la performance. En revanche, un échauffement suffisamment intense pour élever la lactatémie à environ 2 à 4 mmol/L peut améliorer la cinétique de VO2 et les performances (Jones, Andrew M et al., 2003). Il semblerait donc qu’intégrer une période au-dessus du deuxième seuil d’environ 5 à 6 minutes en continu, ou sous la forme d’intervalles, pendant votre échauffement soit optimal.

La prudence s’impose cependant, un échauffement qui est soit trop intense, soit qui n’intègre pas suffisamment de temps de récupération de sorte que la lactatémie immédiatement avant le départ soit supérieure à environ 5 mmol/L, pourrait avoir un effet néfaste sur la performance malgré des effets positifs sur la cinétique de VO2 (Koppo, K, and J Bouckaert., 2002).

Ainsi, il est probablement préférable d’éviter les exercices d’intensité élevée (par exemple, les sprints de 10s ou 1 min en zone 6) qui élèvent la lactatémie au-delà de 5 mmol/L, car ils peuvent nuire à la performance (Burnley, Mark et al. , 2005 ; Burnley, Mark et al., 2011).

Dans cette situation, il est probable que les niveaux de PCr musculaire ne se soient pas rétablis et/ou que les métabolites associés au processus de fatigue (par exemple, le phosphate inorganique et les ions hydrogène) soient élevés au point d’interférer avec le muscle et la puissance et donc de réduire les performances.

Le timing optimal

Une question clé lorsqu’il s’agit d’inclure une période d’intensité dans votre échauffement est quand l’inclure. Une étude de Burnley et al. (2006) s’est penchée sur cette question spécifique, en examinant la cinétique de VO2 en réponse à des efforts de haute intensité (2x 6 minutes en zone 5). Les efforts ont été répétés à plusieurs reprises, séparés par différentes périodes de récupération (allant de 10 minutes à 60 minutes).

La cinétique de VO2 au cours du deuxième effort de 6 minutes (zone 5) est illustrée ci-dessous, où les points ouverts indiquent la consommation d’oxygène après un échauffement, et les points fermés indiquent la « condition de contrôle » où aucun échauffement n’a été inclus.

L’étude montre que les bénéfices d’un échauffement semblent durer entre 10 et 45 minutes. Il y a donc une bonne marge de flexibilité bien que la durée optimale entre votre effort intense et le début d’une compétition ou d’une séance d’intervalle est probablement de 15 à 20 minutes.

Variabilité individuelle

Il convient de noter qu’il existe des différences individuelles en ce qui concerne le type d’effort intense qui fonctionne le mieux. Certains athlètes peuvent mieux répondre à un effort d’intensité plus modérée et d’une durée plus longue (par exemple 10-12 minutes juste en dessous du seuil de lactate) (Burnley, Mark et al. , 2005). Nous vous recommandons donc de tester diverses routines d’échauffement lors d’entraînement ou sur des compétitions à faible priorité pour voir ce qui semble fonctionner le mieux pour vous.

La routine d’échauffement optimale devrait se traduire par un effort plus facile qu’il ne le serait sans un échauffement. Cela devrait fournir une bonne indication subjective pour savoir si un protocole d’échauffement fonctionne pour vous, surtout si vous ne parvenez pas à tester votre lactatémie.

Exemple d’une routine d’échauffement pour un CLM

En cas de doute, on recommande la routine d’échauffement suivante comme bon point de départ :

  • Commencez votre échauffement en roulant pendant 10 à 30 minutes en augmentant progressivement l’intensité d’environ ~ 45 à 50 % FTP (effort 2-3/10) jusqu’à environ 65 à 80 % FTP (niveau d’effort 3-4/10 ). Cela aidera à réchauffer en douceur vos muscles et vos ligaments et à réduire le risque de blessures musculo-squelettiques.
  • Effectuez un effort d’environ 6 minutes à environ votre puissance maximale de 20 minutes (ou environ 103-108 % FTP, ou un niveau d’effort d’environ 8/10).
  • Roulez légèrement (45-60% FTP ou niveau d’effort 2-3/10) pendant 10-15 minutes, puis reposez-vous ou continuez à rouler facilement jusqu’à votre compétition/intervalles.
  • Essayez de chronométrer votre échauffement de manière à ce que l’effort de 6 minutes soit terminé environ 15 à 30 minutes avant votre compétition ou votre séance d’intervalle. En pratique, cela signifie commencer votre routine d’échauffement complète environ 40 à 60 minutes avant votre événement.

Néanmoins, un effort intense durant votre échauffement peut ne pas être bénéfique pour certaines activités où la vitesse de la cinétique de VO2 est moins déterminante de la performance. Pour les événements longs (c’est-à-dire ceux qui durent plusieurs heures et commencent à une intensité inférieure au second seuil), effectuer un effort à haute intensité durant l’échauffement induira une fatigue inutile.

Conclusion

Comment optimiser son échauffement ? Retenez ces 4 règles :

Règle 1: Intégrer une période au dessus du second seuil d’environ 5 à 6 minutes, en continu, ou sous la forme d’intervalles.

Règle 2: Éviter les exercices d’intensité élevée (par exemple, les sprints de 10s ou 1 min en zone 6)

Règle 3: La durée optimale entre votre effort intense et le début d’une compétition ou d’une séance d’intervalle est de 15 à 20 minutes.

Règle 4: Individualiser. Faites des tests. Idéalement, mesurer votre lactatémie pour vous situer entre 1 et 5 mmol/L avant le départ. Sinon, basez vous sur vos sensations et vos performances.

D’une manière générale, les échauffements incluant un effort intense sont fortement recommandés pour toutes les épreuves d’une durée comprise entre 2 et 40 minutes environ, ou pour les épreuves qui commencent par un effort intense au départ (par exemple, VTT XC ou cyclocross). Ils sont également utiles pour les séances fractionnées qui cherchent à accumuler du temps d’entraînement proche du VO2max.

Le cas de la course à pied

Compte tenu de l’intérêt démontré de l’échauffement avec un effort intense en cyclisme sur l’accélération de la cinétique de VO2, il est surprenant que les études se soient concentrées presque exclusivement sur les réponses à l’exercice en cyclisme. En effet, très peu d’études se sont intéressées à la course à pied, ainsi, est-ce que l’on peut transposer les résultats en cyclisme à la course à pied ?

Tout d’abord il faut dire que la cinétique de VO2 pendant d’autres modes d’exercice, y compris la course à pied, peut avoir des caractéristiques assez différentes (Carter et al., 2000 ; Jones et Burnley, 2005). Par exemple, la constante de temps (τ) pour la phase II de la cinétique de VO2 a tendance à être plus courte et l’amplitude de la composante lente du VO2 a tendance à être plus petite, en course à pied par rapport à l’exercice à vélo (Billat et al. , 1998 ; Carter et al., 2000 ; Jones et McConnell, 1999).

À ce jour, il n’y a pas d’explications certaines à cette différence entre vélo et course à pied. Probablement que des facteurs tels que les différences de masse musculaire active, de régime de contraction musculaire, de flux sanguin, de résistance à la fatigue et de recrutement de fibres entre les modes d’exercice pourraient être impliquées (Carter et al., 2000Jones et Burnley, 2005).

Il convient également de noter qu’il existe des différences dans la fraction d’utilisation du VO2max aux seuils. Effectivement, le premier seuil intervient en moyenne à 70% du VO2max pour la course et environ 50% en cyclisme. De la même manière, le deuxième seuil intervient en moyenne à 85% du VO2max pour la course et environ 75% en cyclisme (Jones et Burnley, 2005).

À propos de l’effet de l’échauffement sur la cinétique de VO2 en course, Jones et al. ont démontré que l’échauffement avec un effort intense ne modifie pas la cinétique de VO2 pendant la course à haute intensité sur tapis roulant, du moins chez les jeunes sujets physiquement actifs. Ils supposent que la cinétique de VO2 relativement rapide et la composante lente du VO2 relativement faible dans la condition de contrôle ont annulé toute amélioration de la cinétique de VO2 après échauffement.

Ainsi, il pourrait être inapproprié de faire des déductions à partir des résultats d’études sur l’effet de l’échauffement en cyclisme à d’autres modes d’exercice, tels que la course.

Bibliographie

Billat, V L et al. “The V(O2) slow component for severe exercise depends on type of exercise and is not correlated with time to fatigue.” Journal of applied physiology (Bethesda, Md. : 1985)  vol. 85,6 (1998): 2118-24. doi:10.1152/jappl.1998.85.6.2118

Burnley, Mark et al. “Effects of priming exercise on VO2 kinetics and the power-duration relationship.” Medicine and science in sports and exercise  vol. 43,11 (2011): 2171-9. doi:10.1249/MSS.0b013e31821ff26d

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Burnley, Mark et al. “Time required for the restoration of normal heavy exercise VO2 kinetics following prior heavy exercise.” Journal of applied physiology (Bethesda, Md. : 1985)  vol. 101,5 (2006): 1320-7. doi:10.1152/japplphysiol.00475.2006

Carter, H et al. “Oxygen uptake kinetics in treadmill running and cycle ergometry: a comparison.” Journal of applied physiology (Bethesda, Md. : 1985)  vol. 89,3 (2000): 899-907. doi:10.1152/jappl.2000.89.3.899

Jones, A M, and A M McConnell. “Effect of exercise modality on oxygen uptake kinetics during heavy exercise.” European journal of applied physiology and occupational physiology  vol. 80,3 (1999): 213-9. doi:10.1007/s004210050584

Jones, Andrew M et al. “’Priming’ exercise and O2 uptake kinetics during treadmill running.” Respiratory physiology & neurobiology  vol. 161,2 (2008): 182-8. doi:10.1016/j.resp.2008.02.001

Jones, Andrew M et al. “Prior heavy exercise enhances performance during subsequent perimaximal exercise.” Medicine and science in sports and exercise  vol. 35,12 (2003): 2085-92. doi:10.1249/01.MSS.0000099108.55944.C4

Koppo, K, and J Bouckaert. “The decrease in VO(2) slow component induced by prior exercise does not affect the time to exhaustion.” International journal of sports medicine  vol. 23,4 (2002): 262-7. doi:10.1055/s-2002-29080

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